L’Association franco-ontarienne des conseils scolaires catholiques (AFOCSC), l’Association des conseils scolaires et des écoles publiques de l’Ontario (ACÉPO) et l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO) s’inquiètent des effets des coupes effectuées à l’Université Laurentienne sur la francophonie et l’enseignement en Ontario.
«Je trouve ça ridicule qu’à ce moment-ci, lorsqu’on essaie de survivre en tant que francophonie, on coupe 57 % des programmes en français. Ça fait aucun bon sens», dit le président de l’ACÉPO, Denis Chartrand.
Ces coupures de la Laurentienne comprennent le congédiement d’une centaine d’enseignants et l’abandon de plusieurs programmes, dont études françaises, mathématiques, théâtre, génie minier, géographie et éducation au niveau intermédiaire/supérieur.
Selon les associations, la réduction sévère de l’offre de programmes en français signale un mouvement très dangereux pour le système scolaire franco-ontarien et sa communauté. «Si on coupe dans certains programmes clés, comme les arts et les mathématiques, il y aura de grands effets. Il va manquer des éléments importants dans le système éducatif francophone», dit la présidente de l’AEFO, Anne Vivet-Roy. «L’Université Laurentienne a diplômé plein de gens dans le système éducatif. C’est vraiment inquiétant.»

Les trois associations ont publié conjointement une lettre le 15 avril appelant le ministère des Collèges et Universités, le ministère des Affaires francophones et l’Université Laurentienne à formuler «une solution acceptable à la communauté francophone».
Moins d’enseignants pour la 11e et 12e année
L’abandon par la Laurentienne du programme d’éducation intermédiaire/supérieur aura sans doute un effet marqué sur l’éducation secondaire en Ontario. Sans ce programme, aucun étudiant en enseignement à la Laurentienne n’aura les qualifications pour enseigner en 11e et 12e année.Soulignons que les étudiants ne peuvent plus s’y inscrire depuis l’année dernière.
Seule l’Université d’Ottawa sera capable de former les enseignants francophones pour le niveau intermédiaire/supérieur.
Le manque de formation pour la 11e et 12e année, jumelé à la pénurie d’enseignants qualifiés, pourrait forcer les conseils scolaires à soit abandonner les classes de spécialisation au niveau secondaire ou envoyer des enseignants non qualifiés enseigner une matière pour laquelle ils ne sont pas qualifiés.
La perte de ce programme d’enseignement peut avoir un impact énorme sur la qualité de l’éducation des élèves. «Ça diminue la qualité de l’éducation et ça diminue l’éventail des cours qu’on peut offrir», dit M. Chartrand.

L’Université cite un faible nombre de demandes d’admission pour expliquer la fermeture du programme. «Oui, il y a certainement un élément financier. Mais en même temps, ce sera potentiellement au détriment du système scolaire franco-ontarien», dit Mme Vivet-Roy.
Une pénurie d’enseignants qui ne cesse de s’aggraver
Selon les associations, les coupes n’aideront pas la pénurie de personnel enseignant en Ontario. «On prend ça très au sérieux. On a tellement une grosse pénurie au niveau des enseignants, au niveau des francophones», explique la présidente de l’AFOCSC, Johanne Lacombe.

«On essaie de trouver des solutions pour la pénurie et on voit ces coupures. L’AFOCSC recueille beaucoup de ses enseignants de la Laurentienne, c’est un impact très dangereux. En plus de ça, on n’aura pas loin à aller pour ressentir les effets. Dans les prochains 5 ans, nous allons ressentir ces effets», souligne Mme Lacombe.
«On cherche des étudiants qui viennent d’être diplômés. On en a besoin environ 800 par année», dit M. Chartrand.
Perte en mathématiques
L’abolition du programme de mathématiques en français semble aller à l’encontre des ambitions du ministère de l’Éducation. Depuis le 31 mars 2020, tout nouvel enseignant qui veut obtenir sa carte de compétence de l’Ordre des enseignantes et enseignants de l’Ontario doit réussir un test de compétence en mathématique.
De plus, le gouvernement déploie des efforts depuis plusieurs années pour améliorer les résultats du Test provincial en mathématiques (TPM) en 9e année.
Il n’est pas clair si la perte du département de mathématiques en français entrainera la perte des cours en français pour ceux qui suivent le programme d’enseignement, mais les intervenants sont inquiets que les étudiants de la Laurentienne reçoivent une moins bonne formation en mathématiques.
Un appel à former un comité
«Il faut regarder en détail ce qui se passe. Il faut faire un comité d’experts qui se connaissent dans le monde de l’éducation, pour qu’ils s’assoient et regardent à la situation pour faire des recommandations qui font du bon sens. Tu ne peux pas me dire que 57 % francophone ne fonctionnent pas», dit M. Chartrand.