Yves et Lianne Paillé ont trouvé l’édifice au 183, rue Broadwood à New Liskeard pour héberger le gite pour sans-abri qu’ils désirent établir. Ils prévoient y accueillir aussi bien des hommes et des femmes qui ont besoin d’un moment de recul, que des toxicomanes ou des gens sans domicile fixe, qu’ils soient en transit ou de la région.
«Une fois qu’ils ou elles ont un chez eux, on peut les influencer positivement», explique Yves Paillé, l’initiateur du projet avec son épouse Lianne.
«Les familles souffrent terriblement quand un enfant rencontre des difficultés de santé mentale ou de toxicomanie. Il n’y a pas de services. On se bute toujours à un mur de brique», ajoute Lianne Paillé.
Zack, le fils du couple a eu des problèmes de santé mentale et de toxicomanie, alors ils connaissent bien le sujet. «On a tout essayé, même du tough love! Pour les parents qui refusent la maison à un enfant qui arrive encore sous l’influence de stupéfiants, c’est terrible. Où est-ce que je vais l’envoyer; c’est l’hiver? On passe des nuits blanches», avoue Yves Paillé.
«Tu es seul, tu t’isoles! Tu frappes à bien des portes, c’est chaque fois un échec», renchérit Lianne Paillé.
Épuisée et découragée par des années d’incompréhension et du sentiment d’abandon des milieux de la santé et des services sociaux, Lianne écrit une lettre dans le journal local The Speaker. Son message : on a besoin de faire quelque chose.
Yves Paillé, de son côté, témoigne sur les médias sociaux avec une vidéo. «Des gens qui nous approchent racontent ce qu’ils ont vécu. Parfois, c’est aussi grave qu’un enfant mort de surdose et, chaque fois, une énorme souffrance», dit Yves Paillé. Progressivement, les Paillé se rendent compte qu’ils sont loin d’être les seuls et un groupe de parents se forme.
L’initiative devient un comité qui veut agir. Et pendant une année, des gens assis autour d’une table, sans expérience, entreprennent des démarches pour savoir comment s’organiser. Ils ont l’appui du député John Vanthof et ils font des demandes de subventions. Ils parlent au responsable de Living Space de Timmins. Celui-ci les conseille et les aide à produire tous les documents, protocoles et règlements nécessaires pour le fonctionnement d’un gite pour sans-abris. Le comité produit aussi un plan d’affaires.
Le plan compte trois étapes. La première étape concerne le personnel et l’aménagement de l’édifice de la rue Broadwood, avec 10 isoloirs. L’usine de meubles modulaires 3H de New Liskeard les construira gratuitement. La deuxième prévoit créer un réseau de partenaires avec tous les services de la région. Enfin, la troisième étape est celle de la réinsertion des sans-abris dans la société, avec le suivi nécessaire à une réintégration réussie.
Le conseil municipal de Témiskaming Shores a bien reçu des pétitions de résidents qui reconnaissent le bienfondé de l’initiative, mais qui ont des craintes sur l’emplacement et semblent surtout dire «pas dans ma cour».
«On doit travailler à changer certaines attitudes dans la communauté. Il faut leur dire : “Si c’était votre enfant…”», fait valoir Lianne Paillé.
Le maire, Carman Kidd, dit publiquement appuyer le projet et affirme que tout est légal. Zack’s Crib ira de l’avant.
Les Paillé espèrent ouvrir le gite en 2022. Entretemps, des gens offrent des meubles et du linge. «On en a d’entreposés à plusieurs places et on fera une vente de garage, dit Yves. Il y a une campagne et des activités de financement. Plein de monde nous donne de l’argent. Même les ambulanciers vont donner un quart de travail par semaine.»
Après toutes les années noires, les Paillé diront : «On devient plus fort au sortir de cette expérience. Puis on s’est fait bien des amis.»
