le Dimanche 24 septembre 2023
le Mardi 20 avril 2021 4:48 Éducation

Déclarations sous serment accablantes

2013 : premier indice que le recteur Giroux bloquerait tout projet d’université francophone
Déclarations sous serment accablantes
00:00 00:00

L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) a déposé plusieurs déclarations sous serment de professeurs de l’Université Laurentienne — qui ont perdu leur emploi — et d’autres intervenants. Les déclarations appuient principalement l’argument que l’Université Laurentienne ne traite pas les programmes, les cours, les professeurs et les étudiants francophones de façon équitable depuis des années. 

L’AFO demande au juge de la Cour supérieure de l’Ontario responsable de superviser la restructuration de la Laurentienne sous la Loi sur les arrangements avec les créanciers de compagnies de lui permettre de représenter les francophones dans le processus et de défendre leurs intérêts.

La déclaration de la professeure de sciences politiques, Aurélie Lacassagne, contient plusieurs récits présentant les limites de la volonté de l’administration de servir la francophonie. 

Elle indique que dès l’arrivée du recteur Dominic Giroux en 2008, elle lui a écrit une lettre recommandant la promotion des programmes francophones pour le recrutement international. Elle n’a jamais eu de réponse. 

Dans ses analyses, le professeur agrégé du département de philosophie, Denis Hurtubise, a souligné que le recrutement international d’étudiants francophones à la Laurentienne a en fait commencé en 2017 seulement.

Aurélie Lacassagne parle ensuite du plan stratégique 2012-2017 de la Laurentienne, où elle était la seule membre francophone du corps professoral du comité. Elle a dû insister pour que des programmes en français soient inclus dans les «programmes vedettes». Malgré leur inclusion, très peu des promesses faites pour ces programmes en français ont été remplies.

La professeure décrit également la politique que la Laurentienne applique depuis plusieurs années, soit de ne pas remplacer les professeurs qui quittent l’établissement. Ainsi, son département est passé de quatre à un seul professeur pouvant enseigner en français entre 2010 et 2018. Par conséquent, plusieurs cours ne peuvent pas être offerts.

Elle relate une discussion avec le recteur Giroux en 2013 lors d’une consultation régionale dans le cadre des États généraux sur l’éducation postsecondaire en français en Ontario. Alors qu’elle était la seule représentante de l’Université Laurentienne membre du comité de coordination, Dominic Giroux lui aurait demandé de démissionner du comité, ce qu’elle a refusé. Elle dit avoir cru à partir de ce moment que le recteur tenterait de bloquer la création d’une université de langue française en Ontario.

La désignation partielle de l’Université Laurentienne sous la Loi sur les services en français a été obtenue 7 mois plus tard. Aurélie Lacassagne se dit par contre déçue de la faible portée de la désignation et n’a pas vu d’amélioration depuis.

Aucun pouvoir

Dans sa déclaration sous serment, Denis Hurtubise dit avoir constaté que les francophones n’ont aucun pouvoir décisionnel à l’Université Laurentienne M. Hurtubise a déjà occupé le poste de vice-recteur aux affaires francophones.

Il fait référence à une lettre du Regroupement des professeurs francophones (RPF) de l’Université Laurentienne qui a été remise au recteur Robert Haché en 2019. Huit problèmes y sont inscrits.

La lettre exprime entre autres l’absence de pouvoir du responsable des affaires francophones depuis que le poste a été rétrogradé à un poste de vice-président associé en 2013-2014. De plus, on empêcherait ce cadre de faire efficacement son travail en lui remettant des tâches qui n’ont rien à voir avec les affaires francophones.

Le règlement de bilinguisme de la Laurentienne stipule que les vice-recteurs doivent comprendre le français ou s’engager à l’apprendre. Cependant, Denis Hurtubise note qu’aucune mesure n’existe pour la mise en œuvre de cette règle et qu’au cours des dernières années, plusieurs vice-recteurs et vice-rectrices unilingues ont été engagés.

La lettre accusait également l’université de ne pas faire la promotion de ses programmes en français, surtout en comparaison avec ses programmes en anglais. De plus, Le Centre pour l’excellence académique offre certains de ses services en anglais seulement.

Il affirme également que l’administration de manque de transparence quant à l’utilisation des 12 millions $ fournis par le gouvernement fédéral pour l’éducation en français. Aucune preuve n’existe que l’université s’en sert pour les francophones.

Le sondage

Un autre membre du comité de coordination du RPF a déposé une déclaration sous serment. Dans son document, le professeur Thierry Bissonnette parle d’un sondage qu’il a aidé à rédiger et qui a circulé parmi les membres du RPF. Parmi les 63 répondants, «pas un seul n’a répondu qu’il était “Oui, très satisfait” avec le bilinguisme de l’Université Laurentienne». En fait, 82,5 % se disaient insatisfaits.

Il dévoile également que depuis qu’il est devenu membre en mars 2020 du Comité mixte sur le bilinguisme — qui inclut des représentants du Sénat et du conseil des gouverneurs —, le comité ne s’est pas réuni, pas une seule fois.

Éducation

Le président de l’Association des conseils scolaires des écoles publiques de l’Ontario (ACÉPO), Denis Chartrand, a également déposé une déclaration sous serment. Il fait état de la pénurie d’enseignants francophones en Ontario, qui empêche le respect de la section 23 de la Charte canadienne des droits et libertés sur l’éducation dans la langue de son choix. L’Ontario aurait immédiatement besoin de 950 enseignants francophones alors que la Laurentienne vient d’annoncer qu’elle diminuait sa capacité de formation des futurs enseignants.

L’histoire

La déclaration sous serment de l’historien sudburois Serge Dupuis présente la relation entre la Laurentienne et les francophones depuis ses tous débuts. Il se réfère largement à des recherches et écrits existants, comme ceux de Gaëtan Gervais, François-Olivier Dorais et Michel Bock. On y retrouve plusieurs refus des autorités en place de remettre les contrôles de l’éducation des Franco-Ontariens entre leurs mains.