Il y a autant de types d’intersectionnalité qu’il y a de gens. Fierté Sudbury Pride a démontré que l’intersectionnalité touche tout le monde — membres de la communauté 2ELGBTQ+ et non membres — en rassemblant un panel de discussion extrêmement diversifié le 14 juillet dans le cadre de la Semaine de la fierté Queerant(a)ine 2.0.
Le terme «intersectionnalité» gagne tranquillement de la notoriété en science sociale. Plusieurs définitions ont été offertes par les participants. Pour Connor Lafortune, qui s’identifie comme autochtones, francophone et queer — mais pas toujours dans le même ordre —, c’est une question d’avoir une «existence à plusieurs facettes simultanément». Par exemple, «à l’aréna, je suis un joueur de hockey», dit-il.
Le président de Fierté Sudbury Pride, Alex Tétreault, offre une analogie. Un objet aussi simple qu’une tasse de café d’une marque populaire vient avec un bagage impressionnant. Par exemple : Où a-t-on cultivé les grains de café? Est-ce du café équitable? Comment a-t-il été transporté? Quel est l’impact de la caféine sur le cerveau? Les mêmes questions se posent pour le sucre, lait et le contenant non recyclable. Il y a ensuite l’établissement où on achète la tasse de café et sa relation avec ses clients et avec les autres chaines…
«Nous ne sommes pas des individus avec une seule identité facile à identifier», soulève Alex Tétreault pour préciser l’analogie. Nous pouvons avoir une langue en commun, mais la façon dont ont a été éduqué, la santé mentale, la religion, la situation économique, l’orientation sexuelle, la couleur de la peau et bien d’autres facteurs influencent notre expérience sociale.
En d’autres mots, un francophone blanc, un francophone queer et un francophone noir, handicapé et queer ne connaissent pas du tout les mêmes défis!
Pour cette raison, il faut tenir compte de l’intersectionnalité lorsqu’on s’attaque à un problème de société. Sinon, une partie de la population que l’on veut aider ne recevra pas l’aide ou, pire encore, pourrait être affectée négativement.
Fluidité ou non
Certains peuvent cacher ou utiliser une de leur identité quand il est plus avantageux de le faire. Connor Lafortune se dit privilégié de pouvoir cacher certaines de ses identités si nécessaire. Par exemple, il ne révèlera peut-être pas qu’il est autochtone lors d’un rendez-vous médical. C’est une simple question d’utiliser l’identité qui est utile dans le moment présent.
D’autres n’ont pas cette chance. C’est le cas de Tanya Quesnel. Atteinte de paralysie cérébrale depuis sa naissance et de problèmes d’apprentissage, ce sont des identités plus difficiles à dissimuler.
Parfois, c’est le contraire : on peut coller une identité à une personne alors qu’elle ne l’a pas. La bibliothécaire de l’Université Laurentienne, Leïla Saadaoui, a plus d’une fois dû expliquer pourquoi une blanche peut venir de l’Afrique et pourquoi, malgré son nom et son identité arabe, elle n’est pas musulmane.
Plus accepté ou non
L’agent de sensibilisation deMarie Bah souligne que les identités ne sont pas toutes acceptées également par divers milieux. Par exemple, selon ses expériences, les noirs sont vu négativement par le milieu juridique, peu importe qu’ils soient travailleurs ou clients.
Connor Lafortune révèle qu’il est moins réticent à présenter son identité queer avec les Autochtones, où elle est plus acceptée, que parmi les francophones. De l’autre côté, dans d’autres milieux, son identité francophone lui ouvre des portes, comme sur le marché du travail par exemple.
Tanya Quesnel affirme qu’elle est généralement bien acceptée, mais qu’il y a parfois de la discrimination involontaire. Elle donne l’exemple de gens qui la prennent en pitié parce qu’elle est «si jeune et ta vie est finie». «Je n’aime pas ça», lance-t-elle. Au contraire, elle est heureuse d’avoir reçu beaucoup d’aide dans sa vie. Sa condition ne l’a pas empêché de faire du ski paranordique et de visiter des villes canadiennes.
Passer par l’éducation
Les quatre panélistes sont d’accord sur un point : Il faut faire plus de sensibilisation pour changer les perceptions et mettre de l’avant l’importance de l’intersectionnalité.
Pour Leïla Saadaoui, il y a encore beaucoup d’éducation à faire. Entre autres pour l’acceptation des problèmes de santé mentale dans la société et le monde du travail. Et du côté des soins de santé, il reste du travail à faire pour obtenir des services dans sa langue — ce qui est essentiel dans un moment de détresse psychologique.
La table ronde a été présentée par Fierté Sudbury Pride en collaboration avec le Centre de santé communautaire du Grand Sudbury, le CNFS Laurentienne, le Centre Victoria pour femmes et Santé publique Sudbury & districts.