Marco Roy est en vacances, sur une petite pointe de sable en bordure du lac où se trouve son camp. C’est le seul endroit où il y a sporadiquement de la réception cellulaire. Il reçoit un message d’une amie : «Félicitations!» Il doit faire un peu de route en véhicule tout-terrain pour avoir une meilleure réception et comprendre : le site SooToday.com annonce que la Ville de Sault-Ste-Marie lui remettra le Community Recognition Award.
L’enseignant de l’École Notre-Dame-du-Sault recevra le prix qui reconnait l’engagement bénévole exemplaire d’un résident. Marco Roy a créé de toutes pièces le programme de musique de l’école où il enseigne maintenant depuis trois ans. Il utilise la musique pour insuffler la passion de la culture francophone et franco-ontarienne aux élèves, puisque la grande majorité des chansons apprises — et jouées en spectacles — sont des chansons franco-ontariennes, québécoises et françaises.
«C’était une vraie surprise. Je me sentais fier et honoré, tout un mélange de sentiments.» Il ne s’attendait pas à gagner, mais sa mère n’avait pas très bien caché son jeu deux ans plus tôt, quand elle remplissait des formulaires pour soumettre son nom à des prix du même genre. «Elle me posait des questions au sujet des différents concerts qu’on fait ici. […] Pis là “Combien d’heures donnes-tu à l’école?”. Mom, pourquoi tu poses toutes ces questions?»
Il remercie aussi sa mère, Lise Roy, qui lui a transmis la fierté de sa langue. «Ma mère est une femme franco-fière. Elle s’est battue pour les écoles francophones à Terrace Bay. C’est un peu elle qui m’a donné cette fierté francophone, le désir de conserver la culture.»
La liste des anciens gagnants de ce prix laisse croire que M. Roy serait le premier francophone à le remporter, mais nous n’avons pas pu confirmer cette information auprès de la Ville à temps.
Évolution naturelle
Marco Roy jouait du piano à l’oreille à l’âge 10 ans. Il y a quelques années, à Thunder Bay, une amie lui a montré trois accords à la guitare. «En une semaine, je jouais mieux qu’elle». Elle lui a donné sa guitare lorsqu’elle est partie.
Un an plus tard, pendant sa première année d’enseignement à Notre-Dame-du-Sault, il a commencé à donner des leçons de guitare à ses élèves qui préféraient rester dans la classe pendant la récréation. Il a fait la même chose pendant l’année où il a enseigné dans une école anglophone. Des années plus tard, des parents de cette école cherchent encore à le contacter pour qu’il donne des cours de musique privés.

À son retour à Notre-Dame-du-Sault, il a décidé de partir un programme de musique pour les élèves du secondaire. «Il y avait un groupe de gars de 12e année qui jouaient à ce moment-là. Je me suis dit : “Si je veux commencer un programme de musique, il faut que ce soit cette année, parce qu’il n’y a pas d’autre musicien dans l’école”», se souvient-il.
L’objectif était d’organiser un bon spectacle avec ces élèves pour intéresser les plus jeunes à la musique et poursuivre. «On n’avait rien. Il y avait juste ma guitare, mon amplificateur.» Son voisin, membre d’un groupe de musique local, lui a prêté le reste de l’équipement pour le spectacle et pendant quelque temps, en attendant que l’école ait les moyens d’en acheter.
«On a fait un concert de Noël et aussitôt que le concert était terminé, j’avais quelques élèves qui sont venus me voir tout de suite.» Il avait mis le paquet pour les impressionner, avec lumière et fumée.
S’il était seul au début, il a eu de l’aide au fil du temps. La première à y croire a été la directrice de l’école à l’époque, Lise Dewar. Elle est allée chercher 2000 $ au Conseil scolaire catholique Nouvelon pour acheter instruments et amplificateurs. Des parents ont plus tard donné d’autres instruments; trompette, accordéons et piano. Une demande à Centraide lui a permis d’acheter le mélangeur (mixer).
L’actuelle directrice, France McLoed, continue d’appuyer son projet. Le comité de parents de l’école a aussi appuyé financièrement ses efforts. Il ajoute Angèle Boucher, qui lui donne bénévolement un coup de main lors des évènements et des spectacles.
Formation complète
Avec l’équipement, il peut non seulement enseigner aux jeunes à jouer de la musique, mais aussi comment faire la technique pour un spectacle. Incluant son et lumière.

«J’essaie de leur faire jouer le plus de concerts possible. C’est beaucoup de travail d’apprendre six chansons, dit Marco Roy. On se pratique beaucoup.» Ceci inclut cinq heures le dimanche et deux séances d’une heure trente en semaine, en plus des récréations.
Ses élèves participent au spectacle de la St-Jean-Baptiste à Sault-Ste-Marie depuis quelques années, à l’église et à Quand ça nous chante en collaboration avec le groupe de l’École secondaire catholique Jeunesse-Nord de Blind River. Ils présentent un spectacle à l’école à la fin de l’année pour ramasser de l’argent pour le programme de musique.
Ils ont participé au spectacle-bénéfice Sky is the limit, pour la santé mentale. «Ce qui est l’fun, c’est qu’on joue notre musique française là, dans un concert qui est tout en anglais. Le feedback a été excellent.»
Les chansons sont choisies en groupe chaque année. Il peut être difficile de trouver des chansons qui peuvent à la fois plaire à tous et permettre à tous de participer, mais ils y arrivent.