Celle-ci a écrit un livre en 2014 sur les quatre premières décennies de l’histoire de la communauté ukrainienne à Sudbury : According to Baba: A Collaborative Oral History of Sudbury’s Ukrainian Community. Baba est sa grand-mère, qui l’a aidé à mener des entrevues et à recenser cette histoire. Mme Zembrzycki enseigne maintenant l’histoire au Collège Dawson de Montréal.
Les Ukrainiens sont sous le joug d’un empire ou d’un autre depuis longtemps. Les premiers immigrants étaient majoritairement des hommes qui fuyaient l’impérialisme des tsars russes à la recherche d’un salaire fiable et d’une vie plus paisible. Plusieurs se sont d’abord installés au Manitoba parce qu’on leur offrait des terres. Mais d’autres ont été attirés par les mines de Sudbury.
Ils se sont d’abord établis dans les communautés environnantes, près des mines où ils travaillaient. Le travail difficile et la discrimination qu’ils subissaient, surtout pendant la Première Guerre mondiale, ont créé une communauté relativement unie.
Après la guerre, un nombre encore plus important d’Ukrainiens sont arrivés au Canada et à Sudbury. Même ceux qui s’étaient installés dans l’Ouest du pays reviennent vers Sudbury en raison «des terres difficiles sinon impossibles à cultiver» et parce que les emplois miniers étaient payants, raconte Mme Zembrzycki.
Lire la réponse de la communauté sudburoise à la crise ukrainienne.
Ils s’installent alors dans Pollock Town à Coniston et Copper Cliff, mais aussi, et en majorité, dans le quartier multiethnique Donovan. En fait, la première église ukrainienne catholique en Ontario a été construite à Copper Cliff à cette époque. Elle a brulé peu de temps après.
Ces plus récents arrivants apportent avec eux l’idéologie communiste des bolcheviks, qui réclame entre autres de meilleures conditions de travail. «Ils se battent pour sensibiliser à propos de leur situation. Ils montent des pièces de théâtre, des groupes d’enfants autour d’idéaux plus progressistes», dit l’historienne.
«Ça finit par créer un gros problème à Sudbury, parce que Inco veut seulement des travailleurs catholiques, parce qu’ils ne veulent pas que leurs travailleurs se syndiquent.» Par conséquent, plusieurs Ukrainiens et Finlandais qui partagent ces idées sont refusés par l’entreprise.
Ces idées créent également des frictions au sein même de la communauté ukrainienne, entre ceux qui sont présents depuis plus longtemps et ces nouveaux arrivants aux idées révolutionnaires. Les affrontements escaladaient régulièrement en violence.

La grand-mère de Stacey Zembrzycki devant les écoles St-Louis-de-Gonzague et St. Aloysius au Nord du centre-ville.
Pas d’amitié avec les Franco-Ontariens
D’après ses recherches et son expérience personnelle, la relation entre les Franco-Ontariens et les Ukrainiens a longtemps été tendue, parfois violente. Il y avait une division marquée entre les résidents du Moulin à Fleur francophone et ceux de Donovan, même s’ils l’espace entre les écoles St-Louis-de-Gonzague et St. Aloysius au Nord du centre-ville.
«Il y avait des batailles au couteau dans la cour d’école. Il y avait toujours des batailles entre les enfants [des deux quartiers]. C’est une des mémoires qui revenaient souvent. Je suis allé à St. Aloysius et nous n’avions pas la permission de traverser la cour d’école et de parler aux enfants francophones. Je crois que l’incompréhension entre les deux communautés a mené à ces tensions», avance Stacey Zembrzycki.