Ce titre est particulièrement pertinent lorsqu’on a lu le texte «J’ai le cœur gros» signé par Mireille Groleau et publié sur notre site le 8 avril. Comme des dizaines de milliers de jeunes du Nord de l’Ontario, Mireille est une diplômée de l’Université Laurentienne. Et comme nous tous, elle est triste et en colère.
En colère contre tous ces administrateurs qui ont bafoué l’avenir prometteur que la Laurentienne offrait au Nord en 1960. Triste parce que, malgré son peu d’engagements envers les francophones, la Laurentienne a quand même servi de tremplin à plusieurs générations de jeunes Franco-Ontariens qui ont marqué le Nord.
En parlant de ces jeunes, on peut penser, entre autres, à tous ceux qui se sont rencontrés à la Laurentienne dans les années 1970 et ont mis Sudbury sur la carte culturelle du Canada français. On leur doit le Théâtre du Nouvel-Ontario, la maison d’édition Prise de parole, la Nuit sur l’étang, CANO, la Galerie du Nouvel-Ontario, la Slague et une longue liste d’auteurs, de musiciens, d’artistes qui ont suivi.
Il est triste de penser qu’on risque de perdre ce point de rencontre, mais les récentes nouvelles liées au processus judiciaire entrepris par l’université indique clairement cette déchéance. Rappelons que la Laurentienne est insolvable et s’est placée sous la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies (LACC). Depuis, le Sénat de l’université s’est rencontré à huis clos pour entériner un plan de restructuration qui va faire mal.
Les quelques bribes qui ont fuité lundi indiquent déjà l’élimination de plus de 60 programmes, dont une grande partie en français. Et c’est sans compter la dissolution de la Fédération Laurentienne, décrétée il y a deux semaines, qui élimine tous les cours en français offerts à l’Université de Sudbury.
La seule petite lueur d’espoir dans tout ce charivari, c’est le dépôt la semaine dernière d’une motion en Cour supérieure de l’Ontario visant à forcer l’Université Laurentienne à «entamer des consultations avec L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario à titre de représentante de la communauté franco-ontarienne à l’égard de tout plan de restructuration ou de mesures visant à assurer la viabilité financière susceptible d’avoir une incidence sur le statut ou l’usage du français…».
La motion se base sur la Loi sur les services en français, sur la Charte canadienne des droits et libertés et de la Partie VII de la Loi sur les langues officielles. Elle somme le contrôleur nommé par la Cour d’aviser cette dernière de toutes mesures d’arrangements avec les créanciers qui aurait une incidence sur «les droits linguistiques et constitutionnels de la communauté franco-ontarienne».
On ne sait jamais ce qu’un tribunal pourrait décider quant à cette motion, mais, chose certaine, ça pourrait jeter un pavé dans le plan de redressement de la Laurentienne. Espérons que ça nous soit favorable, ne serait-ce que pour protéger des programmes qui pourraient ensuite être transférés à une université de langue française.